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Bataille de Morhange - Sarrebourg
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12 septembre 2010

Echo de la bataille de Morhange dans les rues de Metz

   Dès la déclaration de guerre de l’Allemagne à la France, la population de Metz est en pleine effervescence avec le départ des troupes de la garnison prussienne qui rejoignent la ligne de front en lorraine.

Le 14 août 1914, la population est en proie aux nouvelles de toutes sortes venant de la zone des combats. Des trains de blessés et de prisonniers français affluent en gare pendant qu’un convoi de soldats gagne le front. Un spectacle affligeant !

Une messine, Jeanne Haas, note ses impressions :

            Jeudi 20 août – Hier soir, plusieurs régiments demeurés à Metz ont quitté la ville, se dirigeant vers le sud où une très grande bataille est attendue. Le spectacle des exilés quittant la ville avec enfants et bagages est déchirant ; on s’embrasse, on pleure, on échange avec ceux qui restent les recommandations dernières. On sanglote, on gémit, et peut-être que dans quelques jours nous envieront ceux qui sont partis.

Le canon tonne sans relâche… Une formidable bataille est engagée entre les troupes françaises et allemandes entre Morhange, Rémilly et environs. Un témoin oculaire (un chauffeur bavarois qui conduisit des munitions jusque sur le champ de bataille) raconte une admirable charge de la cavalerie française au cours de laquelle plusieurs régiments allemands (cavaliers) furent acculés aux mitrailleuses qui les décimèrent ; le même témoin dit que la route, les prés, les champs, étaient jonchés de morts et de blessés dont les cris de souffrance et de détresse sont déchirants ! 67 autos ont été requises pour transporter les blessés ; vers l’extrême soir (10 h) le bruit se répand en ville d’une éclatante victoire, et la foule bruyante pousse de frénétiques Hourrah ! Cependant la Mutte ne sonne pas, et les visages des officiers supérieurs sont soucieux et très sombres.

            Vendredi 21 août – Toute la nuit les voitures d’ambulance ont sillonné la ville, ramenant les blessés dont on dissimule le nombre. Dès le matin, vers 4 h 10, le canon tonne de nouveau et sans interruption ; on reconnaît facilement le tir des mitrailleuses. Tout le monde s’entretient de la bataille d’hier ; on prétend que 15 000 Français sont prisonniers, que le reste de l’armée est repoussé sous les forts pour que ceux-ci achèvent de la détruire. Toutes nouvelles difficiles à contrôler, et que ne confirment, en tout les cas, ni la Mutte silencieuse, ni les invisibles drapeaux.

Les trains sont coupés entre Strasbourg et Metz, et entre Sarrebruck et Metz. Les exilés empruntent la ligne de Trèves pour gagner les pays rhénans. Beaucoup de dames confectionnent activement chemises, draps, taies, linges pour les blessés. Hier soir, l’œuvre de la Bibliothèque française de Saint-Michel, installée dans l’une des salles de l’ex Sacré-Cœur rue de Châtillon, a reçu l’ordre d’évacuer et d’enlever ses 7000 volumes, qui seront déposés dans une des caves de l’établissement. Le Sacré-Cœur sera transformé en ambulance. La mort du pape Pie X, connue hier dès le matin, a causé peu de surprise et passe presque inaperçue au milieu des heures si tragiques que nous vivons.

À 6 h du soir, la Mutte sonne… De frénétiques acclamations retentissent, la foule prend d’assaut les bureaux des journaux, tandis que sur la place d’Armes, devant l’hôtel de ville, M. Forêt, maire de Metz, annonce avec un discours de circonstance la grande victoire remportée par les troupes allemandes commandées par le Kronprinz de Bavière sur 9 corps d’armée et demi français près de Dieuze. L’exaltation des Allemands est à son comble. Les drapeaux se déploient aux fenêtres de nombreuses maisons particulières et sur les monuments publics. La joie des uns contraste avec la mine défaite des autres, tandis que la Mutte continue à tinter lourdement, broyant nos cœurs et brisant nos vœux.

Extrait de Jeanne HAAS - Journal 24 juillet 1914 à novembre 1918. Manuscrit (Académie Nationale de Metz).

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